- Auteur : Georges Demory
- Avec : Georges Demory
- Mise en scène : Georges Demory
Faut-il croire en ses rêves à tout prix ?
Georges Demory a toujours voulu être chanteur d’opéra. On vit son histoire avec lui. Sa passion pour l’opéra, ses premiers cours de chant avec Monique, qu’il incarne sur scène; ses mimiques sont désopilantes. Il campe ainsi tous les personnages qu’il rencontre, prenant parfois à témoin le public. Il a la fougue de la jeunesse, le désir chevillé au corps, des étoiles plein les yeux et nous aussi.
Georges Demory est éminemment sympathique : on a plaisir à l’écouter, d’autant plus que des notes d’humour sont présentes dans son spectacle. Il rend l’opéra accessible à tous et on est ravi d’être instruit par un pédagogue dont le timbre et l’art oratoire séduisent.
Son interprétation de tous les personnages de Carmen subjugue l’auditoire. Même s’il n’est pas parvenu à atteindre son rêve, on est attendri par son amour de la vie et donc de la musique. Il porte en lui un enfant qui ne cesse de s’émerveiller. Son spectacle élève l’âme, il nous transporte et parle à la part d’enfance de chacun. Il fait siennes les paroles de l’écrivain Jacques Marie Laffont : 《Ne jamais cesser de croire à « la semaine des quatre jeudis ». L’enfant qui demeure en tout homme adulte ne doit jamais pleurer. La vie doit demeurer un moment d’ivresse et de joie, car seul le bonheur permet d’exister et avec lui l’amour》in Pensées pour le meilleur et pour le pire.
Georges Demory a choisi une route difficile et l’auditoire ne regrette pas qu’il ait emprunté un chemin ardu : sa performance suscite le rire du début à la fin, on apprécie les anecdotes et bien sûr la performance vocale. On est ravi d’avoir devant nous un chanteur lyrique dont la qualité d’écriture, la verve séduisent. La patte de Georges Demory contribue à la réussite de ce one-man show renversant. On se réjouit du choix de l’artiste de suivre sa voie, celle la moins empruntée, pour reprendre les termes de Robert Frost dans son poème, The Road Not Taken.
L’inattendu, l’inventivité s’invitent dans ce spectacle mémorable qui ravira les néophytes, dont je suis, mais aussi, j’en suis sûr, les connaisseurs. L’auteur de ce spectacle a mis tout son cœur dans ce spectacle : on ressent beaucoup d’émotions et on est admiratif de son talent de conteur, de sa capacité à occuper tout l’espace, en un mot à charmer.
On note beaucoup de fraîcheur, de belles ruptures, une interaction avec un public conquis, public qui est invité à donner de la voix. La partie d’improvisation donne du relief à l’ensemble.
Georges Demory a presque tout d’un héros tragique, il lutte contre le sort pour faire partager son art. Il s’impose une discipline et une exigeance telle qu’on n’est pas déçu du voyage, tant s’en faut. À la différence d’un héros tragique, on lui souhaite de triompher de l’adversité.
Le comédien a eu droit à des applaudissements nourris, largement mérités, pour saluer sa prestation de très haut niveau, particulièrement homogène. Beaucoup ressortiront avec l’envie irrépressible d’aller à l’opéra. On eût aimé que le spectacle durât plus longtemps.
David Season, Les Chroniques d’Alceste
Publié le 29 novembre 2025
Au Lieu, chaque jeudi, à 20h15.